Après l’appel de 3 grandes compagnies à réduire notre consommation d’énergie, posons-nous la question du rôle de la Supply Chain dans cette ambition.
Depuis quelques mois, nous voyons apparaitre parmi les KPI Supply Chain, les coûts liés aux
consommations énergétiques au même titre que les coûts de stocks et les coûts de production. La
consommation énergétique coûte de plus en plus cher aux entreprises, pour trois raisons.
Les entreprises sont pénalisées par une tendance de forte augmentation du prix de l’énergie, dont une des origines est la taxe carbone, composante de la taxe intérieure, qui est passée de 7€/tCO₂ en 2014 à 44,6€/ tCO₂ actuellement, avec un objectif de 100€/ tCO₂ en 2030.
Une deuxième pénalisation est la perte de parts de marché générée par un bilan carbone trop élevé tiré par la consommation énergétique. A moyen terme et peut-être plus rapidement (moins de 5 ans ?), le bilan carbone et la neutralité des entreprises seront des orders qualifiers pour les entreprises,
un impératif pour rester attractif sur les marchés. Ces dernières souhaitent donc disposer dès à présent d’un bilan carbone de leurs produits, tangibles ou intangibles. L’exemple des compagnies aériennes qui viennent de lancer leur propres calculateur CO₂ (CO₂ Connect) accessibles à leurs clients, illustre
bien cette tendance de fond.
Ainsi pour tenir les objectifs financiers de l’entreprise, les Supply Chains sont mises à contribution pour réduire les consommations énergétiques et minimer les coûts induits. Ils leur faut donc faire preuve de flexibilité pour trouver les meilleures combinatoires leur permettant d’optimiser leurs consommations, aussi bien sur l’amont que sur l’aval (sur le Scope 3 du GHG Protocol). Comment s’y prendre ?
Le report modal prend toute son importance dans ces réflexions.
Le transport est le secteur d’activité qui contribue pour 31% des émissions de GES, constitué en quasi totalité par les transports routier, où les poids lourds comptent pour 24% Le transport routier de
marchandises reste prépondérant avec 331 milliards de tonnes-kilomètres en 2019. De fait le secteur est sous tension, accrue par le développement des ZFE1. Tous les leviers techniques d’amélioration sont sollicités : changement de source d’énergie, changement de motorisation, modes de conduite.
Le transport ferroviaire de marchandises représentait 32 milliards de tonnes-kilomètres en 2019. Sa part dans les émissions nationales des GES est minime. Le secteur est sous tension du fait de son ouverture à la concurrence (24 opérateurs de fret ferroviaire sur le territoire actuellement).
Si son maillage figé, ses points de rupture de charge fixes ainsi que sa capacité contrainte n’en font pas un mode de transport de marchandises privilégié au premier abord, il pourrait se montrer plus attractif grâce à l’Etat dont l’ambition est de doubler la part modale de ce mode de transport d’ici 2030 dans sa stratégie nationale pour le développement du fret ferroviaire.
La part du transport fluviale reste faible : sur les 373 milliards de tonnes-kilomètres transportées en
France en 2019, 89% l’ont été par la route, 9% par le train et 2% par le réseau fluvial. Cependant elle a
progressé de 4% en 2021 par rapport à 2020. Les émissions de GES de ce type de transport sont
négligeables au regard des autres modes (4 % des émissions du secteur transport en France). Selon
l’ADEME, des « changements structurels forts » sont intervenus dans ce secteur démontrant une volonté de changement très positive : hausses de la productivité, du trafic conteneurisé et de la
1 Zone à Faibles Emissions, ex-Zones à Circulation Restreinte : zones où la circulation de certains types de
véhicules est plus ou moins restreinte selon le niveau d’émissions
capacité moyenne ; dans le même temps, des essais de migration vers des carburants alternatifs moins
polluants sont en cours, afin de réduire les émissions.
Quant aux acteurs de la logistique du dernier kilomètre, maillon incontournable du e-commerce et du
B2C, ils peuvent être un des leviers pour faire baisser le bilan carbone des livraisons. Le transport de marchandises comptant pour 25% des émissions de CO₂ en ville, effectuer la livraison jusqu’au client
à l’aide de vecteurs fonctionnant aux énergies alternatives et/ou renouvelables peut contribuer à
réduire le coût carbone de la logistique urbaine.
S’il existe des outils de pilotage opérationnel, la flexibilité demandée aux Supply Chains est bien d’être capable de rechercher la meilleure des solutions qui combine la sobriété énergétique et le respect de la promesse de service. La recherche de solutions « agiles » capables de s’adapter aux différents
environnements (omni-canalité, saisonnalité de la demande, diversité produits, …) repose d’une part
sur la bonne connaissance des offres existantes et de leurs contraintes de mises en œuvre (volumétrie d’intérêt, délais, réseaux existants, …) et d’autre part sur la capacité à les combiner entre elles. Elles posent alors de débat de la complexité de leur pilotage opérationnelle et la nécessité d’avoir les organisations dimensionnées pour cela.
Votre Supply Chain est-elle organisée pour cela ? Parlons-en !
Sources :
-ADEME, Bilans GES
-Ministère de la Transition Ecologique, Chiffres clés du climat, France, Europe, Monde, 2022